Costa Rica

COSTA RICA

C’est au Costa Rica que se trouve l’une des cinq zones bleues au monde, où l’on bat encore des records de longévité : la péninsule de Nicoya. La longévité et le dynamisme de ses centenaires ont longtemps été attribués à un régime à base de plantes, mais à tort : comme la plupart des populations traditionnelles, la part calorique de leur alimentation se compose en fait essentiellement de graisses animales (poulet, graisse de porc, bouillon d’os).

HISTOIRE

Au XVIe siècle, les espagnols décrivent l’alimentation des habitants du Costa Rica : volailles, poissons, œufs, tortues et gibiers de forêts sont chaque jour mis à l’honneur, tout comme le chuche, une race de porc locale. Depuis 1570, sous l’influence espagnole, l’élevage s’est décuplé ainsi que la consommation de produits laitiers. Jusqu’à la moitié du XXe siècle et l’introduction du sucre, des huiles végétales et des farines raffinées, Nicoya maintenait donc une alimentation ancestrale.

L’ALIMENTATION EN DETAIL

Les derniers centenaires de Nicoya mangeaient l’ensemble de l’animal : la graisse, la peau et les organes des animaux étant toutefois préférées aux muscles. On cuisinait au saindoux, et l’on se battait pour obtenir le foie. Mais la viande consommée était bien élevée, nourrie naturellement avec une herbe riche et de l’eau de source. On mangeait également beaucoup de gibier.

La soupe de poulet (avec la peau) était un aliment très important de leur alimentation : riche en gélatine et particulièrement anti-inflammatoire, elle est encore réputée faire des miracles [2]. Avec le saindoux et la viande de porc, la peau de poulet faisait justement partie des trois aliments de base de la cuisine nicoyenne.

Dans toutes les cultures traditionnelles, les femmes enceintes recevaient un supplément alimentaire dense, et Nicoya n’y fait pas exception. Tous les jours, elles recevaient en plus de leur repas une soupe aux os, cuite avec des haricots, du saindoux et un type de plantain particulièrement riche en magnésium et potassium. Le tout accompagné par des œufs durs.

Les nicoyens consommaient également des produits de la mer : poissons et fruits de mer étaient souvent au menu. Or, Weston Price avait déjà remarqué que les populations traditionnelles qui vivaient à proximité de la mer étaient souvent en meilleure santé que les autres, probablement grâce à cette consommation de produits marins [3]. Néanmoins, au vu de l’actuelle contamination des océans, il n’est pas certain que cette consommation soit tout aussi bénéfique qu’à leur époque.

Pour compléter cette large palette alimentaire, les nicoyens consommaient également des laitages : ils buvaient régulièrement le petit lait issu de la fabrication du fromage, et l’utilisaient dans leurs soupes. Or le petit lait est particulièrement réputé pour diminuer le risque de cancer, et augmenter l’immunité [1]. Certains centenaires avaient aussi pour habitude de consommer du lait aigre (laissé dehors une nuit entière) pour se « rafraîchir le foie ».

Les féculents étaient aussi bien présents et diversifiés, sans toutefois représenter la base de l’alimentation. On mangeait aussi bien du yucca que du taro, de l’igname, du mais ou du plantain vert.

QUELQUES PLATS TRADITIONNELS

  • chicharron :

  • Sustencia : jarrets de porc cuits avec du foie, des reins, des oreilles, des joues, du cerveau et du cœur, épicés avec coriandre, ail, oignons et poivrons. 

  • Sofrito : plat à base de cerveau et de joues de porc, destiné à tous ceux qui nécessitent un « coup de pouce » et en particulier les femmes enceintes. Plat local de Samara.

  • Soupe d’iguane : la graisse est écrémée, puis conservée pour la cuisson. Parfois utilisée pour supplémenter les femmes enceintes.

  • Soupe de jarret : une soupe importante, à base de jarrets de porc, réputées pour renforcer les os.

MODE DE VIE, ENVIRONNEMENT

Si la longévité de nicoyens est très majoritairement due à leur alimentation, il convient de noter que leur mode de vie est particulièrement favorable à la santé : les familles sont très soudées, le cadre religieux leur permet une cohésion sociale et une certaine confiance en l’existence, ils possèdent beaucoup de ‘routines’, se lèvent et se couchent suivant les rythmes du soleil, utilisent très peu les nouvelles technologies, passent des heures à produire leur alimentation… Les personnes âgées trouvent leur juste place dans cet équilibre, et se sentent utiles : elles font la cuisine, gardent les enfants ou les animaux, passent du temps avec leurs descendants…

Leur environnement est également un facteur de santé non négligeable : leur milieu alterne entre forêt humide aux arbres immenses et plages cristallines à l’eau d’azur… Or, comme le notait René Dubos, la santé augmente avec la beauté d’un environnement. Sans compter l’importance des bains de forêt (dont on sait désormais qu’ils diminuent le stress et augmentent l’immunité), et du contact physique avec la terre…

L’ARRIVEE DE L’ALIMENTATION INDUSTRIELLE

Les centenaires nicoyens sont peut-être les derniers à atteindre un âge aussi avancé tout en étant exceptionnellement exempt de douleurs et de maladies. Dans leur jeunesse, le sucre blanc n’était pas encore vraiment introduit : on mangeait occasionnellement du tapa dulce, un édulcorant à base de sucre de canne évaporé, que l’on mélangeait avec de la noix de coco ou de la citrouille. C’est à partir des années 50 que le sucre blanc se répand de façon importante.

L’alimentation des nicoyens n’a donc plus rien à voir avec celle d’il y a un siècle, de nouveaux aliments ayant été importés :

– le sucre blanc

– les jus industriels

– les farines raffinées

– le riz blanc

– les huiles végétales

– condiments artificiels

– etc…

D’autres changements ont été apportés : introduction des vaccins, remplacement de l’eau de source par de l’eau chlorée, développement des pesticides, des engrais… Or, le développement de l’agriculture industrielle pose de graves problèmes de santé, pour les populations vivant à proximité des champs tout comme pour celles qui ne font qu’en consommer les fruits : une terre industrialisée, c’est une terre dépossédée de ses qualités nutritives ; et les aliments qui en sont issus sont bien moins riches en vitamines, minéraux et enzymes qu’au début du XXeme siècle.

L’impact sur la longévité commence par ailleurs à apparaître : les maladies explosent, et le nombre de centenaires est en chute libre. Un employé de la maison de retraite de Nicoya témoigne : « Quand je suis arrivé ici il y a six ans, le foyer comptait quarante-cinq centenaires. Aujourd’hui, nous n’en avons plus que deux. » Au final, les zones bleues ne sont peut-être que des zones qui n’ont été envahies que tardivement par l’alimentation industrielle et le mode de vie moderne. Il s’agit désormais de se demander combien de centenaires existeront encore lorsque cette génération disparaîtra…

L’ENFANCE D’UN CENTENAIRE : JOURNEE TYPE

Les nicoyens consacraient une grande partie de leur journée à travailler dans les champs ou avec les animaux. Ils se levaient au rythme du soleil et mangeaient à des horaires réguliers, en mettant des produits animaux dans chacun de leur plats.

  • LEVER – 3h00 ou 4h00 (2 heures avant le lever du soleil)

  • COUCHER – 18h30/19h00 (1 heure après le coucher du soleil)

  • PETIT DÉJEUNER – 5h00
    Tortilla de maïs avec un gros morceau de fromage frais (le fromage peut aussi être fait à partir de
    petit lait)
    Riz (du jardin) haricots (restes de soupe cuits avec des os) cuits dans du saindoux
    Œufs

    Lait caillé
    Café de la ferme

  • COLLATION – 8:00
    Semoule de maïs cuite avec du lait (parfois avec un peu de saindoux, surtout au cours du dernier mois de grossesse)

  • DÉJEUNER – 9 h 30
    Identique au petit-déjeuner,
    auquel on ajoute une soupe de viande, de poisson ou d’os cuite avec des morceaux de viande, de maïs et de tubercules

  • COLLATION – 12h00
    Café accompagné de tubercules bouillis ou de
    tamales (pâte de maïs mélangée à du saindoux avec un morceau de porc à l’intérieur et cuite dans des feuilles de bananier)

  • DÎNER – 15h30

    Identique au déjeuner, ou simplement une soupe aux os (soupe de poisson une fois par semaine)
    Tubercules ou
    tamales

  • COLLATION – 18h00
    Semoule de maïs cuite avec du lait

CONCLUSION

Ainsi, la longévité et la vigueur exceptionnels des nicoyens semblent être principalement attribuable à leur alimentation très riche en produits animaux de bonne qualité (os, abats, peau étant favorisés par rapport aux muscles). Néanmoins, leur mode vie basé sur un contact avec la terre et des relations sociales soudées, ainsi que la richesse de leur terres avant l’industrialisation et la beauté de leur lieu de vie semblent être des éléments contributifs de leur état de santé.

SOURCES

https://www.westonaprice.org/health-topics/costa-rica-land-centenarians/#gsc.tab=0

https://www.nationalgeographic.fr/voyage/2019/12/costa-rica-quel-est-le-secret-des-centenaires-du-guanacaste

1] https://wikipredia.net/fr/Whey#cite_ref-5

2] https://www.kousmine.fr/lincroyable-bouillon-de-poule

3] Nutrition and physical degeneration Weston A.Price